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  • pascalgalvani

le bonheur du dessin

« Se promener dans la beauté. Aller d’un arbre à l’autre, et d’une technique à l’autre. Observer ce monde qui a ses intérêts, bonheurs, charmes. Je me donne à cette vie séduisante qui parait futile, mais une organisation secrète se cache en elle » (Alexandre Hollan, « je suis ce que je vois »)


Le dessin d’après nature est une pratique de suspension, d’oubli de soi et des mots. Le dessin produit une sorte de révélation au sens où l’image révèle les formes du monde. Comme le dis Paul Ingbretson, on peint comme si on sortait du brouillard…

Regarder avec attention, avec patience et souplesse, pour réinventer, pour retrouver quelque chose. Regarder n'est pas rien, c'est un travail « à l'envers » : se détacher du concept, des formulations, de l'envie de s'exprimer, de l'envie de se mettre à dessiner, à peindre. (Alexandre Hollan Je suis ce que je vois p.18)

Il y a un bonheur, une joie pure dans cette suspension où se révèle les formes que le dessin accompli. Jubilation de la forme en formation.

Le dessin est l’ouverture de la forme.

le dessin est « l’ouverture de la forme » : élan, départ, levée, mais aussi disponibilité inépuisable, c’est-à-dire capacité propre à « frayer, amorcer, inciser » sans cesse le tracé (trait ou trace, c’est pareil) — trait se tirant de rien pour le seul plaisir « du sens du geste, du mouvement, du devenir ». Le dessin n’est plus, dans cette perspective, chose de la volonté ou de l’intention (« Pour savoir ce qu’on veut dessiner, il faut commencer à le faire », disait Picasso à Brassaï), pas plus qu’il ne relève de l’expression ou de la subjectivité au sens courant de ces termes : il est et reste une puissance d’être, une force dynamique, potentielle, avant ou au-delà de toute forme déposée sur le support (papier, écran ou autre : car le dessin se traduit en tout art, il est « mélodique, rythmique, filmique, poétique »). (Désir du dessin Ginette Michaud, Érudit 2012-239)



Jacques Truphémus cite souvent Bonnard « Le dessin c’est la sensation. La couleur c’est le raisonnement » (Bonnard, Observation sur la peinture). Le dessin c’est la suspension de toute pensée, de tout savoir sur les choses, la suspension même des mots qui découpent le monde. La suspension qui peut laisser émerger l’impression visuelle.

« Rester sur le même dessin soir après soir : laisser travailler le temps. De suspension le regard se tourne lentement vers l'invisible. De suspension l'espace devient de plus en plus tactile, silencieux. La vue s'étale, comme une trame vivante qui se laisse imprégner de tout ce qui est là... Et quand tout trouve sa place juste, on a le sentiment d'être au cœur des choses. (Alexandre Hollan, je suis ce que je vois p.71)


Alors, parfois, de cette suspension, surgi le kaïros, moment de grâce d’un advenir en perpétuel renouvellement…

Ni prédiction ni préparation, le dessin se donne donc comme un instantané, kairos du geste, unique « mais non pas isolé » : il « est interminé (in-fini) et c’est légitimement qu’il s’inscrit dans une pratique interminable (infinie). De ce processus incessant, de cet inachèvement naît l’attente irrésolue [...] (Désir du dessin Ginette Michaud Érudit 2012-239)

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